vendredi 1 mai 2020

Le Sars Cov-V2 a t-il été ingéniéré?

Brûlante question que nul n'ose poser à haute voix de peur d'être marqué au fer rouge du sceau de l'infâmie conspirationniste. Tant pis. Au risque de de se voir privé de sa crédibilité journalistique en béton armé, Delanews reprend du service après quatre années d'interruption pour s'attaquer au gros morcife. Notre sacerdoce de l'info nous pousse à jouer les héros incompris au même titre que les soignants payés au Smic qu'on récompense en tapant sur des casseroles à 20h. News un jour, news toujours, comme dit l'autre.



OK Delanews, vous vous la racontez mais nous on s'en tape. On veut juste savoir. Le coronavirus du Wuhan, échappé d'un labo ou pas? Créé par manipulation génétique ou pas?

Ah, lecteur, pour une fois, on va prendre modèle sur la grande presse et te répondre à la manière des Informés de France Info. La réponse est : on ne sait pas. Attends, c'est pas parce qu'on a rien à dire qu'on va la fermer quand même. Et on va te raconter une belle histoire avec des scientifiques, des français, l'institut Pasteur, le Washington Post, Fox News, des diplomates américains en Chine, des chauves souris et des femmes, des ministres, des conflits d'intérêt et encore plein de choses. Si après ça tu ne restes pas, on jette l'éponge.

Bon, allez y, mais doucement, les relations internationales, ça prend la tête.

D'ac. Il était une fois une fois... une jeune femme chinoise qui rêvait de sauver le monde. La blouse blanche lui sied lorsqu'à 26 ans elle obtient une maîtrise auprès de l'Institut de virologie de Wuhan. Shi, c'est ainsi qu'elle s'appelle, se passionne pour ces micros briques à peine vivantes. Ensemble de protéines pour certains, organismes embryonnaires pour d'autres, grâce à leur faculté reproduction. Les virus contiennent des chaînes d'ADN ou d'ARN et se multiplient en infectant les cellules d'autres créatures. Un champ d'investigation quasi illimité pour la jeune Shi, qui entre à 35 ans à la prestigieuse Académie des Sciences chinoise. Forte de la reconnaissance du Parti, elle peut désormais prendre part à des programmes internationaux et c'est en France, à Montpellier, qu'elle obtient en 2000 son doctorat pour une thèse sur le virus bacilliforme des crevettes Penaeidae. Il faut de tout pour faire un monde.



Devenue respectable docteur d'Etat à 36 ans, Shi Zhingli rentre en Chine. C'est là qu'elle va faire sa première rencontre avec les coronavirus. En 2003, le monde prend peur alors que le Sars infecte 8000 personnes dans une trentaine de pays. Betacoronavirus apparu dans la province de Guangdong en Chine, il est finalement contenu mais son origine reste mystérieuse. Shi Zhingli et son collègue Wendong Li, un zoologiste de Pékin, mettent en évidence que le Sars partage un matériel génétique extrêmement proche d'une famille de coronavirus présents au sein d'une population de chauves souris originaires du Yunnan en Chine. Proche, certes, mais pas identique. Rappelons d'ailleurs que le chimpanzé et l'Homme partagent 98% de leur génome sans être identiques. Les deux scientifiques aimeraient prouver leur théorie, mais pour cela il leur faudrait trouver un virus parfaitement identique à celui du Sars. Selon la légende, ils passent des années à investiguer dans les caves du Yunnan éprouvette et écouvillons en main, à sonder la moindre trace de guano. En vain. Malgré quelques articles enthousiastes, il n'est scientifiquement pas possible d'affirmer que que le Sars de 2003 provient des bat caves de Yunnan, fut-il passé par l'intermédiaire de la Civette. Une théorie qui resurgira d'ailleurs plus tard pour expliquer l'origine du Sars CoV2, faisant état des mêmes similarités génétiques, alors qu'elles ne sont en réalité comprises qu'entre 85 et 92% même chez le Pangolin. Le papier de la virologue dans Nature ne laisse d'ailleurs pas place au doute, puisque l'abstract souligne que l'origine du Sars reste "elusive" même si on peut affirmer qu'il est de la famille des coronavirus isolés dans les grottes du Yunan.



Avec l'obstination qui caractérise les bons scientifiques, Shi Zenghli, qui gagne au passage le surnom de BatWoman, refuse de s'avouer vaincue et souhaite démontrer avec certitude ce que son intuition lui dicte. Elle veut comprendre comment un coronavirus peut passer de l'animal à l'Homme. Car pour semblables qu'ils soient avec le Sars, les coronavirus des chauves souris ont une petite différence. Ils ne comportent pas la protéine de pointe nécessaire à l'infection des cellules humaines. Or a l'époque, Ralph Baric, un virologue américain de l'Université de Caroline du Nord, pratique notamment un type de recherches baptisée Gain of Function (GoF). Elles consistent essentiellement à rendre un virus plus infectieux par manipulation génétique. Shi Zenghli sait de son côté que le Mers, un virus Sars responsable d'un syndrome respiratoire apparu au Moyen-Orient, possède de telles protéines. Avec le Dr Ralph Baric, ils manipulent donc un coronavirus de chauve-souris inoffensif pour les êtres humains, joliment nommé HKU4, en lui ajoutant les protéines du Mers. Ce que les scientifiques expliquent sans ambiguïté dans un article paru en 2015 dans le Journal of Virology. Pour la bonne bouche, en voici un traduit un extrait évocateur : "Pour évaluer les changements génétiques potentiels requis pour que HKU4 infecte les cellules humaines, nous avons re-ingéniéré la pointe de HKU4, dans le but de renforcer sa capacité à médier l'entrée virale dans les cellules humaines. À cette fin, nous avons introduit deux mutations simples, S746R et N762A, dans la pointe HKU4." Et ça marche. Les souris de laboratoire de Shi Zenghli tombent malade. Elle promet ensuite un essai sur les singes.



Une partie de la communauté scientifique internationale réagit plutôt mal à cette annonce. C'est notamment le cas de Simon Wain-Hobson, de l'institut Pasteur, qui s'inquiète dans une longue interview au Monde des éventuelles conséquences que pourraient engendrer une fuite de ces recherches. Pour le chercheur, de telles technologies sont assez faciles à mettre en œuvre. Il regrette également le manque de conscience de certains scientifiques parfois inféodés aux milieux politiques et financiers. Aux Etats-Unis, le débat sur le Gain of Function avait débouché sur un moratoire dès 2014 lorsque le gouvernement s'était engagé à ne plus financer ce type de recherches. Exception faite, semble t-il, pour le HKU4 de BatWoman. Une doctorante de Ralph Baric présente à l'époque précise dans une interview au Newsobserver que cette recherche avait été jugée sans danger par le National Institutes of Health et pouvait donc échapper au moratoire. En avril 2020, face à la pression récurrente sur Internet, Ralph Baric déclare à Nature que la chimère crée en 2015 n'était pas du tout similaire au Sars CoV2. Cependant certains croient voir dans le nouveau virus des traces connues. C'est en particulier le cas du professeur Luc Montagnier, prix Nobel pour la codécouverte du virus du Sida, pour qui le Sars Cov2 et le VIH posséderaient des protéines commune. Il s'appuie notamment sur une étude indienne brièvement publiée sur  le site spécialisé bioRxiv avant d'en être retirée sous la pression scientifique internationale. Quelques séquence d'acides animées semblables parmi des milliers d'autres ne seraient que le fruit du hasard.

 

La Chine, de son côté, n'a signé aucun moratoire sur le Gain of Function. C'est peut être ce qui motive début 2018, l'ambassade américaine en Chine à envoyer à plusieurs reprises des "diplomates scientifiques" visiter le laboratoire P4 de Wuhan. Shi Zinghli y officie notamment en tant que directrice adjointe. La suite, désormais connue, est racontée par Josh Rogin dans un papier du 14 avril 2020 du Washington Post. Sans appel, les inspecteurs américains avertissent Washington à deux reprises du danger potentiel que représente le laboratoire. Manque de personnel qualifié, management peu performant et surtout travaux sur des coronavirus des chauves-souris pouvant interagir avec une protéine ACE2 qui leur permet d'infecter des cellules humaines, inquiètent les scientifiques de l'ambassade. Ils réclament plus d'aide et plus d'attention de la part de l'administration US, pour éviter une nouvelle pandémie de type SARS. Un signal d'alarme ignoré par Washington, qui resurgira au sein des différentes agences gouvernementales US dès le début de l'épidémie de Covid à Wuhan. Et un officiel anonyme dont on devine sans mal l'emploi de conclure le papier de Josh Rogin en arguant du fait que l'hypothèse d'une fuite du Sars Cov2 du laboratoire de Wuhan coche de nombreuses cases, tandis que celle de l'origine animale, aucune. Bref, de quoi étayer la demande en réparation de Donald Trump aux autorités chinoises.





Il faut dire qu'il y a matière s'inquiéter légitimement. Le coronavirus du Sars n'aime visiblement pas être confiné puisqu'il a réussi à s'échapper à plusieurs reprises de laboratoires de virologie. D'abord en 2003 à Singapour, puis à Pékin en 2004, cas confirmé par l'OMS, qui s'étonne du manque de protections prises par les scientifiques infectés. Si il n'est pas possible d'affirmer avec certitude que son cousin le SARS Cov2 a lui aussi pris la poudre d'escampette, on peut en revanche rappeler que dans les laboratoires de virologie, les incidents sont monnaie courante. On passe pour celui qui explose en Russie, libérant Ebola et Variole, sur les 2348 tubes de Sras "égarés" par l'institut Pasteur, la résurgence en 1977 de H1N1, il y a encore beaucoup d'autres exemples dans l'interview par Slate de Martin Furmanski, qui conclue par le classique : "ce n'est pas un si mais un quand" cher aux anglophones. Au total, des centaines d'incidents chaque année poussent le monde à deux doigts du gouffre.



Car pour bien contenir un virus, il faut une installation certifiée. Et c'est là que la France entre dans la danse. justement, elle est plutôt bien dotée en la matière. A Lyon, la fondation Mérieux à financé un labo de haute sécurité P4. Inauguré en 1999, il est géré par l'Inserm depuis 2004. Il bénéficie d'une réputation internationale, tout comme Alain Mérieux, milliardaire des biotechs que le président chinois Xi Jinping vient saluer lors de sa première visite en France. Sans surprise, c'est donc "l'ami chinois" qui est nommé à la tête du comité de pilotage chargé de créer un laboratoire P4 pour l'institut de virologie de Wuhan. Une opération de 40 millions d'euros promue par Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin,qui connaît des débuts difficiles. Les services tricolores, relayés par quelques députés à l'Assemblée, estiment en effet que doter la Chine d'un tel outil lui permettrait de développer plus facilement des armes bactériologiques. Le programme prend donc pas mal de retard. D'autant que Pékin ne joue pas vraiment la transparence. Afin de l'aider à combattre le Sars, le gouvernement Raffarin lui avait fait don de deux laboratoires P3 mobiles peu après l'épidémie. Ils disparaissent dans les méandres de la diplomatie, les Chinois refusant d'informer Paris sur l'usage qu'ils en ont. Pour éviter une nouvelle déconvenue, les Français conviennent que le nouveau labo de Wuhan accueillera des programmes de recherche internationaux. Il est notamment prévu que 50 chercheurs français y travaillent en résidence. Ils n'y mettrons jamais les pieds. Idem pour l'architecte français chargé de la construction du P4. Il se voit remplacé au pied levé par  une entreprise chinoise elle même contrôlée par une entité dépendant de l'armée populaire chinoise, indique Christophe Izembard, auteur de France Chine, les liaisons dangereuses. En tout cas à l'époque Washington ne se fait pas prier pour reprendre le flambeau. Les américains distribuent aide et programmes de recherches conjoints, il n'est donc pas surprenant de voir la francophile Shi Zhengli collaborer à l'époque avec l'Université de Caroline du Nord, qui bénéficie au passage de ses avancées en matière de coronavirus. On retrouvera d'ailleurs l'armée populaire chinoise à Wuhan lorsque pour faire face à l'épidémie, Pékin nommera le major général Chen Wei, experte en guerre biologique à la tête de la région pour combattre l'épidémie.



Fuite ou pas fuite? Manipulation génétique ou pas? A la rédaction de Delanews, nous ne supputons pas. Nous n'avançons que des faits. Pour la fuite, jusqu'à présent présentée par la presse française comme une odieuse théorie conspirationniste, elle commence à devenir une hypothèse certes nauséabonde, mais envisageable depuis les révélations du Washington Post. Il faut dire que les tendances conspirationnistes du célèbre quotidien sont assez difficiles à déceler. Si la presse française, détenue en majorité par des intérêts liés aux grandes entreprises, est si prompte à écarter écarter une hypothèse pourtant plausible, c'est que les enjeux sont énormes. A Wuhan, on croise notamment pêle-mêle Eurocopter, Peugeot-Dongfeng, Renault,  Schneider Electric, L'Oréal ou Pernod-Ricard. L'on comprend mieux, alors, pourquoi débunkers et fact-checkers hexagonaux se sont empressés de nier toute fuite   sur les seules dénégations de Shi Zhingli, qui a "juré sur sa vie" qu'il n'y en avait pas eu. Un argument certes, mais que se permettent encore d'écarter les magistrats; contrairement aux journalistes français.

Pour la création du Sars CoV2 en laboratoire, bornons nous à reprendre le docte papier de Nature : il n'y a aucune preuve que ce soit vrai. Les scientifiques pensent que l'origine du coronavirus est très certainement animale". Pas de quoi inquiéter un fact checker, donc. Sauf peut être le Parti communiste chinois, qui a indiqué récemment aux chercheurs de l'Empire du Milieu que toute publication sur l'origine du virus devrait d'abord être approuvée par ses instances politiques avant d'être publiée. Car si Nature prend la précaution de rappeler qu'il n'y a pas de preuve que le virus ait été manipulé en laboratoire, le Parti communiste chinois le formule en creux par sa censure, il n'y a pas non plus actuellement de preuve du contraire. Mais un troublant faisceau d'indices avérés.

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